Décorticage d'une discipline qui a le vent en poupe.

De nombreux cyclistes s’y convertissent et chantent ses louanges. De multiples épreuves voient le jour, allant des compétitions aux randonnées. Les organisateurs ont bien compris l’intérêt de capter les pratiquants de ce phénomène grandissant. Les marques, quant à elles, ont saisi l’opportunité en proposant des machines de plus en plus intéressantes. Tout le monde en parle et chacun a son avis. Nous on va essayé d’ajouter notre vision des choses à la question : c’est quoi le gravel?
Définition

Littéralement, gravel signifie gravier ou gravillon. Il désigne donc un revêtement de surface couramment utilisé pour recouvrir des parkings, des cours ou, ce qui nous intéresse directement, des chemins et sentiers.
Le gravier est constitué d’un mélange de cailloux concassés, dont la granulométrie varie. On retrouve ainsi différentes dimensions de gravier, définies par une taille minimale et maximale des granulats (petits cailloux). Les standards classiques incluent par exemple : 0/4, 4/6, 6/14, 8/16, 0/20, 20/40, 40/60… Ces dimensions, exprimées en millimètres, influencent directement la qualité du roulage. Une dimension minimale de 0 mm correspond à une poussière de cailloux, relativement stable et idéale pour compacter la surface de roulement. Les dimensions supérieures, quant à elles, servent souvent à créer l’assise du chemin.
ça c'est pas gravel!
ça c'est gravel!


Un peu d’histoire
Les premières routes macadamisées apparaissent aux États-Unis en 1823 avant de véritablement se développer dans les années 1920 avec l’essor de l’automobile. En France, l’asphaltage du réseau routier débute dans les années 1950. Avant cela, les routes étaient constituées de plusieurs couches de gravier de granulométrie variée, parfois surmontées de dalles de pierre, comme à Éphèse.

Le vélo, lui, voit le jour en 1817 grâce au Baron Karl Drais von Sauerbronn, inventeur de la draisienne, une sorte de vélo en bois sans pédale. Le vélo moderne, avec sa transmission à chaîne, apparaît dans les années 1860, marquant également la naissance des premières courses cyclistes.
Ainsi, entre 1860 et 1950, la majorité des cyclistes pratiquaient déjà le gravel sans le savoir. Durant cette période, le monde du cyclisme avait en réalité 90 ans d’expérience sur des chemins non asphaltés. À partir des années 1950, la qualité des routes s’améliore grâce à l’asphaltage et la pratique du vélo route se spécialise et voit le développement de vélos de route plus performants avec des pneus toujours plus fins

L’avènement du VTT
L’origine du gravel, telle qu’on la connaît aujourd’hui, est souvent attribuée aux États-Unis et aux pionniers du VTT des années 1970. Les premiers VTT, sans suspension et dotés d’une géométrie rudimentaire, étaient plus adaptés aux pistes forestières qu’aux singletracks techniques. Dans les années 2000, le VTT connaît un essor majeur avec des avancées technologiques importantes (suspension, géométrie, freins, pneus…) qui rendent les sentiers escarpés accessibles au grand public.
Cette évolution a toutefois eu une conséquence : les chemins forestiers, auparavant accidentés, apparaissent de plus en plus lisses. Pour retrouver des sensations fortes, les riders se tournent vers des sentiers techniques toujours plus exigeants. Il suffit de comparer la course de Crans-Montana 2024 (voir article ici) aux Jeux Olympiques d’Atlanta en 1996 pour comprendre l’évolution des parcours.
Cette radicalisation technique a laissé un vide dans le marché, comblé par la pratique du gravel. Aux États-Unis, cette tendance s’est popularisée grâce aux vastes espaces ponctués de centaines de kilomètres de pistes gravillonneuses. Le gravel redonne un intérêt aux chemins rapides et peu vallonnés, délaissés par les VTT modernes.
Un vide dans le marché

Ce schéma ci-contre illustre l’évolution du vélo depuis sa création jusqu’à nos jours en fonction du type de voirie.
En 1860, le vélo voit le jour, les pistes sont toujours pavées ou en gravillons.
En 1950, l’asphaltage du réseau secondaire est lancé, des routes asphaltées apparaissent. Les vélos y trouvent un intérêt.
En 1980, l’asphaltage massif se poursuit et les vélos quittent les routes forestières en gravier pour rejoindre l’asphalte. Le VTT arrive également et explore les pistes et chemins forestier.
En 2000, l’évolution technologique dans le monde du VTT rend les routes forestières peu attrayantes. Les vélos de route reste sur les routes asphaltées. Ceci créé un vide dans le marché. Ni le VTT ni le vélo de route ne semble intéressés par les routes en gravier.
En 2010, le gravel bike est né
Le gravel, l’archétype de la liberté


Le gravel est souvent associé à une sensation de liberté et aux aventures qu’il permet de vivre. Ce type de vélo autorise l’enchaînement des kilomètres sans se soucier de l’état de la route ou du sentier. On se concentre sur la découverte, le paysage, et le plaisir de rouler. C’est d’ailleurs ce qui en fait le compagnon idéal des bikepackers, qui apprécient sa polyvalence (voir Ma 1e expérience de bike packing ).
C’est un vélo que l’on peut emmener partout, à condition d’adapter sa vitesse. J’ai déjà emprunté des singletracks techniques au guidon de mon gravel, tranquillement, sans prendre de risques, et en prenant un plaisir immense à me faufiler entre cailloux et racines.
Une variété incroyable de vélos

En revenant à des conceptions plus simples, le marché du gravel s’est ouvert aux petits producteurs et artisans cadreurs, qui proposent des vélos d’exception. Tous les matériaux sont représentés :
- Aluminium : majoritaire, léger et accessible.
- Carbone : pour les amateurs de rigidité et de poids réduit.
- Acier : apprécié pour sa robustesse et sa capacité à filtrer les vibrations.
- Titane : noble, alliant légèreté, filtration et rigidité.
- Bois : oui, même le bois trouve sa place !
Les grandes marques surfent sur cette vague, tandis que les artisans ciblent des niches en proposant des modèles uniques. Il est important de rappeler que le gravel désigne avant tout un revêtement de surface, et non un vélo. Un VTT rigide ou semi-rigide peut parfaitement faire l’affaire avec des pneus adaptés. C’est d’ailleurs comme cela que j’ai débuté : en convertissant mon semi-rigide 29 pouces avec des pneus étroits et roulants, tout en ajoutant des spirgrips pour varier la position des mains sur le cintre.
La rencontre entre deux mondes

Le gravel est un pont entre deux univers trop longtemps séparés : la route et le VTT. Les cyclistes sur route y voient une opportunité de se rapprocher de la nature sans affronter la technicité du VTT, tout en bénéficiant d’une sécurité accrue loin du trafic. Les vététistes, quant à eux, apprécient de pouvoir travailler leur endurance sur des chemins roulants sans passer par la route.
Cette convergence se traduit aussi chez les constructeurs : des marques spécialisées dans le VTT, comme Santa Cruz, s’ouvrent au gravel, tandis que des marques emblématiques de la route, comme Eddy Merckx ou Pinarello, suivent le mouvement.
Certains considèrent le gravel comme un simple positionnement marketing. Certes, les grandes marques ont saisi cette tendance pour proposer des vélos adaptés, mais elles n’ont pas inventé la pratique. Le gravel est venu combler un vide laissé par l’amélioration technique des VTTs.
Peu importe le flacon…
A la question « C’est quoi le gravel? », chacun y trouvera sa propre réponse. Et c’est tant mieux, ça permet d’enrichir les points de vue de tout le monde.
Au final, peu importe le flacon, pourvu qu’on ait l’ivresse. Le gravel enrichit les gammes de vélos et affine les pratiques cyclistes. Autrefois divisée en deux catégories (route et VTT), le gravel représente peut-être aujourd’hui le meilleur des 2 mondes. Qu’on l’adore ou le déteste, le gravel ne laisse pas indifférent.
Et qui en sort gagnant ?
Le cycliste, qui dispose de toujours plus d’excuses pour aller rouler.
Pour ma part, j’adore son côté versatile et polyvalent, un même vélo pour moultes usages différents. J’aime son côté simple et épuré. J’aime la possibilité de quitter la route pour m’engouffrer dans un sentier sans craindre pour mes jantes. J’aime la créativité dont font preuve les constructeurs et les passionnés, on y retrouve de l’artisanat et des vélos qui ont une histoire à raconter loin de la production de masse. J’aime le fait de rouler sans prise de tête juste pour le plaisir de faire tourner les jambes et de voir du paysage.
Et vous pourquoi vous aimez le gravel?
Et pour vous c’est quoi le gravel?
Dites moi tout!
En attendant, je vous laisse, mon gravel m’attend !
4 Responses
Chouette article une fois de + Oli !
Le Gravel est en effet le vélo « sportif » passe-partout par excellence.
Que ce soit l’ancien cyclo ne se sentant plus trop à l’aise sur notre réseau routier ultra dense et/ou en mauvais état ou alors le VTTiste sur le retour après quelques belles gamelles vu la dangerosité de la pratique, chacun pourra à nouveau s’adonner au « Vélo-Liberté » et retrouver du plaisir au guidon de son vélo.
Et oui, c’est le trait d’union entre 2 pratiques qui se sont un peu tourné le dos quelques années. Au final ce n’est que du bénéfice pour le sport 🙂
Sympathique article.
C’est en effet amusant de se dire que le gravel est « vieux comme le vélo », les premiers cyclistes faisaient du gravel sans le savoir 🙂
Comme tu l’ecris, l’important est de s’amuser et de rouler.
A mes yeux, le gravel est l’idéal pour le bikepacking / family-bikepacking.
Bonne Année 2025 à bikespirit!
Merci pour ton feedback. En effet, on ne fait que recycler les origines du vélo. N’oublions surtout pas l’essentiel qui est de s’amuser ;-).
Meilleurs voeux également